Les nombreuses pertes en vies humaines suites aux malheureux accidents d’effondrements d’immeubles à Douala et à Ngaoundéré la semaine dernière donnent l’occasion aux observateurs ainsi qu’à l’opinion publique de s’interroger sur la chaine de responsabilité des différents acteurs intervenants dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Qui est chargé de quoi dans le processus de construction des bâtiments ? Et que faire pour que de pareils catastrophes ne se reproduisent plus ? Nous sommes donc aller voir du côté des communes, question de comprendre le rôle et les prérogatives des agents de la Mairie dans le cadre des compétences qui leurs sont transférées dans le secteur de la construction. Et c’est le Chef Service Technique de la Commune d’Arrondissement de Yaoundé 5e , M Parfait NGOA, qui a bien voulu répondre à nos questions.
Sommaire
BONJOUR M. NGOA ET MERCI DE NOUS ACCORDER UN PEU DE TEMPS. POUR COMMENCER, POUVEZ-VOUS NOUS PRÉSENTER VOTRE SERVICE ?
Bien, merci pour l’intérêt que vous portez à notre Commune, Yaoundé 5e. Pour répondre à votre question, je peux dire que le Service Technique de Yaoundé 5 , a à sa tête un Chef Service, en ma personne . Je suis Ingénieur en Génie Civil ,et je suis assisté d’un Adjoint qui est là aussi. Nous avons également les différents bureaux qui sont segmentés avec un Chef de Bureau à la tête et ses différents agents.
Nous avons notamment un bureau de maçonnerie. Nous avons un bureau d’électricité et éclairage public. Nous avons un bureau de l’entretien du patrimoine et des ouvrages du patrimoine communal. Nous avons également un bureau de suivi de tous les litiges fonciers et autres. Nous avons un bureau topographique qui assiste tous les services et également le chef de bureau des litiges fonciers et également tous les projets que nous entreprenons de faire.
Donc c’est le topographe qui gère cet aspect là et nous avons un bureau de suivi de tous les autres projets d’investissements. La conception ,le design et l’architecture pour concevoir les différents projets que nous avons à réaliser pour le compte de la Mairie. Et nous avons également le Secrétariat qui assure tout le service de suivi de nos différents travaux. Et donc nous avons une équipe vraiment soudée parce que chacun est vraiment voué à sa tâche et au suivi des recommandations de notre hiérarchie.
UNE IDÉE DES PROFILS DE VOS COLLABORATEURS ? LES MAUVAISES LANGUES ACCUSENT LES MAIRES DE RECRUTEMENTS FANTAISISTES , PAR AFFINITÉS ? ON SOUPÇONNE DES AGENTS D’ÊTRE À DES POSTES POUR LESQUELS ILS N’ONT AUCUNE EXPERTISE ?
Au niveau du service technique, des ingénieurs il y en a. Moi qui vous parle, je suis Ingénieur de Génie Civil et je ne suis pas que le seul dans mon service. Il y a aussi un autre Ingénieur qui est là dans mon service . Il y a d’autres Ingénieurs dans la boîte ; au Service d’ Hygiène par exemple, Il y a aussi des Ingénieurs. Bref il y a des ingénieurs dans la maison. Et vu que j’observe également le fonctionnement de toutes les autres communes d’Arrondissement, nous avons des Ingénieurs qui sont des Chefs de Services et des Cadres dans d’autres communes, ici dans le Mfoundi. Vraiment on ne ment pas dans l’aspect technique. Comme on le dit au quartier, soit on connait , soit on ne connaît pas. Çà se voit. Si tu ne connais pas un aspect technique, ça sera visible. Si tu n’es pas performant dans ce qu’on te demande de faire là , ça ne ment pas.
Donc je dirais que dans mon service, chacun est vraiment dans son domaine et par ailleurs, tel que je vois avec la dynamique de notre Maire, chacun est dans son domaine, ici, dans notre mairie. Il n’y a pas d’affinités ou quoi que ce soit. Et comme vous le voyez, c’est une commune cosmopolite, c’est toutes les ethnies qui sont comprises dans notre arrondissement qu’on retrouve dans les différentes équipes .

COMMENT SE PASSE LE DÉPLOIEMENT DE VOS DIFFÉRENTES ÉQUIPES SUR LE TERRAIN , ICI À YAOUNDÉ 5 ?
Tout part des recommandations des grandes réunions de concertations tous les lundis, avec le Maire. Et aussi, les sollicitations des populations. Vous savez que c’est du social que nous faisons ici, dont le déploiement est fait en fonction de chaque dossier coté mais pas seulement les dossiers, mais aussi le regard que nous avons sur nos tâches que nous devons exécuter dans notre cahier des charges. Et chaque agent dans mon service est à l’affût de ce qu’il doit faire.
AVEZ-VOUS DES ESPIONS DANS LES QUARTIERS ? COMMENT SE PASSENT LES DÉNONCIATIONS ? UN HABITANT PEUT-IL ATTIRER L’ATTENTION DU SERVICE TECHNIQUE PAR RAPPORT À DES TRAVAUX CHEZ SON VOISIN ?
Bon, on ne va pas les appeler des espions. C’est pas des espions, ni des indics, peut être des indics, mais ce n’est pas vraiment tout ça. Mais ce que je peux dire, c’est quoi? C’est que dans les quartiers, nous avons des représentants des populations comme nous avons des Conseillers Municipaux qui sont à la supervision de tous ces comités de quartier. Et dans certains quartiers, nous avons des comités de développement des quartiers qui sont ceux là, qui ont ce regard sur ce qui est fait dans les quartiers. Et c’est eux qui ramènent ces informations auprès de nous pour pouvoir nous déployer sur le terrain. Donc c’est eux. C’est leurs idées endogènes qui viennent là bas, qui font l’organisation, qui font la programmation et qui font même le plan communal de développement. C ‘est eux ,le regard, ce sont eux les dénonciateurs, donc on ne dirait pas. On ne va pas dire qu’ils sont des indics ou bien mais c’est eux des dénonciateurs qui doivent vraiment regarder ce qui est mal fait dans leur quartier et venir dénoncer à la mairie. Et là, nous pouvons descendre et agir. Vraiment sévir comme il se doit.
VOUS N’ÊTES PAS TOUJOURS LES BIENVENUS DANS LES CHANTIERS SUR LE TERRAIN ?
Pas du tout. Pas du tout. Nous ne sommes pas les bienvenus parce que ça arrive souvent qu’il y ait des bagarres, des affrontements. Il y a des trucs que nous avons même souvent recours à faire. Certaines descentes avec les Forces de Maintien de l’Ordre et la Police Municipale. Donc on est vraiment pas les bienvenus. On ne nous aime pas.
POURQUOI ? POURQUOI CETTE ANIMOSITÉ ALORS QUE VOUS DESCENDEZ JUSTE POUR FAIRE VOTRE BOULOT ?

Parce que les Camerounais n’aiment pas se conformer à la loi. Le Camerounais veut toujours bricoler. Il veut toujours jongler, c’est pour ça, Ce n’est que ça. Tant qu’on ne traite pas le Camerounais, Il ne va pas vouloir se conformer. C’est pour ça qu’ils ont toujours vu la Mairie comme ceux là, qui viennent comme un bourreau. Or nous, on a juste un devoir de les ramener à l’ordre . Pour leur dire que ce qu’ils font n’est pas bien. Faites plutôt comme ceci, faites plutôt comme cela. Or, personne ne veut pas écouter ces conseils. Malheureusement, nous ne pouvons pas faire autrement que de faire notre travail. Donc on va continuer à descendre sur le terrain.
ET QUELS SONT LES RISQUES AUXQUELS S’EXPOSENT LES PERSONNES QUI S’OPPOSENT À VOS DESCENTES SUR LE TERRAIN ?
Les risques quand on s’oppose à la loi dans une construction ? C’est simple : dès que vous vous opposez , on va fermer votre chantier, c’est tout. Et même les manœuvres, les techniciens qui travaillent là bas , on va les arrêter et les mettre en cellule. Parce que vous ne devez pas continuer à travailler dans l’illégalité . Si vous vous entêtez , ok, on ferme le chantier et on met en alerte les Forces de Maintien de l’Ordre.
IL Y A AUSSI LE CAS DE CES PERSONNES LÀ QUI FONT DES TRAVAUX DISCRÈTEMENT À L’INTÉRIEUR DES BÁTIMENTS, SANS TOUCHER LE MÛR DE LA FAÇADE AVANT POUR NE PAS ATTIRER L’ATTENTION. ET DU JOUR AU LENDEMAIN , QUAND TOUT EST PRÊT À L’INTERIEUR , ON FAIT TOMBER LE MÛR AVANT. VOUS ÊTES AU COURANT DE CE GENRE DE PRATIQUE ?
Et comment ? Nous sommes bien au courant de ça? Ce sont des petits malins qui jouent au sous-marin dans les quartiers. Mais quand on constate ça, on arrête également les travaux. Donc c’est la même procédure qu’on fait toujours. On arrête tous les travaux là et on vous oblige à vous conformer à la loi.
QUEL EST LA PREMIERE CHOSE À FAIRE POUR ÉVITER LES TRACASSERIES ?
La première des choses à faire c’est d’avoir un titre foncier. Après avoir eu ces documents, on peut monter tout un dossier de permis de construire. Et pour ces permis de reconstruire, c’est avoir au moins les plans architecturaux qui sont signés par un architecte , avoir des plans de masse et des situations avec les différents reculs de l’ouvrage. Et dans la suite de cela, on peut faire un plan.
Dès que tous ces documents sont rassemblés pour avoir aussi un une description d’un devis estimatif des travaux signé par un architecte à l’ordre et a déposé le dossier et le suivez dans une commission qui est composée de différents sectoriels . Malheureusement dans cette commission là , c’est que nous Communes d’Arrondissement , ne sont pas impliqués dans cette commission depuis deux mille vingt. Depuis l’arrivée du nouveau Maire de la Ville, la Commission siège et suite à ses résultats, si l’exploitation de tous ces documents s’avère favorable et exploitable, on peut donc vous attribuer un permis de construire et je dirais que dans la suite de ce permis de construire,
il faut également un document qui est souvent négligé par certains maitres d’ouvrages à savoir un certificat de conformité. Parce que la plupart des erreurs que les promoteurs font ici dehors et les investisseurs, c’est quoi? C’est que quelqu’un peut demander un permis de construire pour un bâtiment R + 1 . Et après l’obtention de ce permis de construire, quand il va au quartier, il va taper son R+3 ou R+4 sans toutefois connaître l’impact que cette négligence peut causer à son ouvrage. Et vous voyez que la sollicitation d’un sol pour un bâtiment R +1 est différente de celle d’un bâtiment R+3 ou R+4 C’est pour ça qu’on assiste parfois à l’ effondrement des bâtiments .
DANS NOS QUARTIERS, ON ASSISTE SOUVENT À DES TRANSFORMATIONS D’HABITATION. UNE MAISON QUI A ÊTÉ CONSTRIUTE EN MATÉRIAUX PROVISOIRES À UNE CERTAINE ÉPOQUE PAR LE PÈRE, AUJOURD’HUI LES ENFANTS VEULENT LA TRANSFORMER EN MATERIAUX DEFINITIFS. QUELLE EST LA PROCEDURE ? LA BONNE DÉMARCHE ? VU QU’ON EST SUR LE MÊME TERRAIN ET QU’ON VEUT JUSTE PASSER DES MATERIAUX PROVISOIRES EN MATÉRIAUX DÉGINITIFS ?
Là on peut parler de rénovation du bâtiment. Il faut avoir l’autorisation de pouvoir faire ces travaux de rénovation parce que c’est un peu comme si c’était un nouvel ouvrage que vous êtes en mettre en œuvre. Donc il faut également qu’il y ait un suivi rigoureux dans cet ouvrage là. C’est pour ça que nos communes d’arrondissement, bien que nous ne n’attribuant pas les permis de construire et nous avons quand même un rôle qui est là pour faire le suivi, le contrôle du défaut de ces permis et pouvoir amender ceux qui ne sont pas en règle et les ramener, les contraindre à se conformer à la loi pour faire de monter leur permis de construire.

ET QUAND DES TRAVAUX SONT MENÉS SANS TENIR COMPTE DE CES OBLIGATIONS ENVERS LA MUNICIPALITÉ, À VOTRE NIVEAU, AU SERVICE TECHNIQUE, COMMENT RÉAGISSEZ-VOUS ?
Comme nous avons une brigade de contrôle des différents permis de construire qui se déploient chaque jour dans l’arrondissement, donc ce qu’ils font, c’est que quand on trouve quelqu’un comme ça et qui a engagé tout un chantier sans toutefois respecter les règles, on vient, on appose les croix de Saint André et on le convoque ici au service technique. On lui oblige au moins à monter un dossier technique en bonne et due forme pour qu’au moins on ait un suivi rigoureux. Donc c’est vrai que c’est une guerre qui n’est pas toujours facile, parce que parfois, vous pouvez aller dans un chantier comme celui là, on va même cacher le propriétaire du chantier. Il n’est jamais là, il est en déplacement.
Vous rencontrez des gens là bas qui ne savent même pas dialoguer. Donc il n’y a pas cette collaboration là entre ces travailleurs et les équipes qui descendent. C’est pour ça que nous sommes souvent obligés de passer à la répression. Parce qu’on a apposé la croix de Saint André. Celui là ne veut pas se conformer. Il ne veut même pas arrêter les travaux. On est obligé de procéder à la répression . On saisit des matériaux, on vient les consigner ici à la Mairie pour les contraindre d’arrêter les travaux, de venir se conformer à la réglementation, pour au moins sortir un dossier technique en bonne et due forme et avoir un permis de construire.
DANS QUEL CAS PRÉCIS, VOS SERVICES PRENNENT LA DÉCISION D’APPOSER LA CROIX DE SAINT ANDRÉ SUR UN BÁTIMENT ?
Justement, il y a souvent des interrogations. Il y en a qui perçoivent cela comme du harcèlement. Pour poser les croix de Saint-André dans un bâtiment, c’est quand celui là n’a pas de permis de construire. Quand on arrive dans ton chantier, on voit que tu as commencé les travaux. On demande qui est le chef de chantier? Qui est le conducteur de travaux ? On évoque le permis de construire? Pourquoi il n’est pas affiché? OK, ils n’ont pas de permis de construire. Bon on met la croix de Saint André , arrêt des travaux et on convoque le responsable à la Mairie pour se justifier.
L’opinion publique doit donc comprendre que s’il y a croix de Saint André au départ, ça veut dire qu’il n’y a pas de permis de bâtir sur ce chantier. Pas de permis de bâtir, ça veut dire arrêt des travaux. Interdit de continuer les travaux. là, c’est quand vous êtes peut être même sur une parcelle de terrain appropriée, susceptible d’accueillir des constructions.
Mais quand vous voyez quand même À DEMOLIR , c’est que vous n’êtes même pas dans un emplacement constructif. Vous êtes peut être dans une zone marécageuse, vous êtes peut être dans une emprise de la route. Là, c’est à démolir. Les deux messages ont des portées différentes À DÉMOLIR (À D) et ARRÊT DES TRAVAUX (A T)

MAIS DANS LES QUARTIERS ON VOIT DES CHANTIERS CONTINUER MALGRÉ CES CROIX DE SAINT ANDRÉ ?
Ah, c’est l’incivisme. Vous savez que l’homme noir, tant qu’on ne le fouette pas, il ne va pas obéir .Donc le promoteur, il est là, il a son argent dans la poche. Il veut lancer ses travaux. Et si la mairie vient arrêter les travaux, lui s’entête.
Il se dit OK : ils vont me faire quoi? Moi je vais continuer à réaliser mon bâtiment. Et on sait que l’État est toujours un peu lent dans ses réactions, donc on suit ces procédures pour pouvoir agir. Parce que vous savez également que démolir un bâtiment, ce n’est pas évident.
Après avoir mis les croix de Saint André, on convoque l’intéressé, le Maitre d’Ouvrage, deux ou trois fois. S’il ne se présente pas , et parfois c’est le cas, on garde toutes ces convocations, on lui sert une mise en demeure. À ce moment , le bâtiment peut être démolit parce qu’il n’est peut- être pas dans une zone constructible, ou encore, qu’il occupe l’espace d’ une servitude ou encore il est construit dans un théâtre de quelqu’un d’autre, ou une zone litigieuse. Dans ces différents cas que je viens de citer, franchement, il faut démolir.
Le plus souvent, ce n’est pas évident de démolir un bâtiment, par une Commune d ‘ Arrondissement, parce que, selon la loi 2019, cette mission revient à la communauté urbaine pour démolir certains types de bâtiments. Mais déjà nous, à la Commune d’Arrondissement de Yaoundé 5e avec la nouvelle vision du Maire BALA Augustin , on n’est plus là dans les négociations avec les populations quand celles-ci ne sont pas dans une zone constructible ou bien quand elles occupent les servitudes . Le Maire a donné des consignes strictes à ce sujet : on suit la procédure tel que prévu par la loi à notre niveau et on passe à la démolition le cas échéant, comme vous l’avez vu un peu partout dans l’ arrondissement ces derniers temps. Oui, on ne dort plus au niveau de la commune d’arrondissement. Donc quand il faut démolir, on démolit, on libère les emprises Et vous voyez, depuis qu’on a commencé à libérer ces emprises dans l’ Arrondissement, vous voyez les merveilles qu’on construit , les espaces publics et tout et tout. Donc ça permet quand même à la population de pouvoir se divertir et être à l’aise.
AUTRE SITUATION QU’ON OBSERVE DANS LES QUARTIERS, M. NGOA, APRÈS LA POSE DE LA CROIX DE SAINT ANDRÉ, ON VOIT CES CHANTIERS QUI EN SEMAINE, SONT AUX ARRÉTS, MAIS LE TEMPS DU WEEKEND, À PARTIR DE VENDREDI SOIR, LES ACTIVITÉS REPRENNENT, SAMEDI, DIMANCHE. ET LE LUNDI MATIN, LE VOISINNAGE CONSTATE QU’IL Y’A UNE DALLE QUI A DEJÀ ÉTÉ COULÉE, LE BÂTIMENT EST MONTÉ. COMMENT EST-CE QUE LE SERVICE TECHNIQUE DE LA MAIRIE DE YAOUNDÉ 5 GÈRE CE GENRE DE CAS ?
À notre niveau je peux dire que ça ce sont les gens qui travaillent dans le “sous marin”, l’illégalité. Parce qu’en principe, il n’y a pas d’activité le Week end. Bon, déjà, il y a une équipe qui est montée, qui est là, qui travaille pendant le Week end pour contrôler ces différents chantiers.
C’est une équipe à la Communauté Urbaine parce que là bas ils ont également un personnel pour cela ,ils ont des effectifs et des moyens de déplacements. Donc ils contrôlent ces chantiers le Week end. Il faut pouvoir suivre ces personnes qui jouent au plus malin. Mais déjà la procédure est la même. Si quelqu’un a continué ses travaux le weekend alors qu’on a demandé l’ARRÊT DES TRAVAUX,
Le lundi, quand on vient bien plus tard on constate , on renouvelle la croix de Saint-André et on convoque le responsable du chantier. Et si ses ouvriers sont là, parfois, on les embarques, avec le soutien des FMO. Le dossier va donc suivre également les mêmes procédures que je vous disais tantôt comme les mises en demeure et passer ensuite une procédure de démolition au cas où le bâtiment n’est pas dans les zones constructibles ou vous êtes dans une servitude, mais pour les autres chantiers peut être qui ne sont pas en règle, qui ont leurs documents techniques et un permis de construire, on va vous ramener à l’ordre et vous obliger à vous conformer à la loi .Mais on voit malheureusement que beaucoup de camerounais préfèrent tricher, et l’incivisme continue.
COMME POUR DIRE QUOI ? LES CAMEROUNAIS N’ONT PAS PEUR DE LA LOI OU LA LOI NE FAIT PAS PEUR AU CAMEROUN ?
Disons, c’est les deux. Le Camerounais en général est têtu. Il n’obéit pas facilement. Tant qu’on ne le fouette pas, il ne veut pas se conformer. Ce n’est que ça. Et à notre niveau, on ne va pas baisser les bras et laisser faire. On va toujours continuer à être derrière eux et à veiller à ce que chacun puisse vraiment comprendre qu’il faut se conformer et avoir tous ces documents techniques pour pouvoir avoir au moins son bâtiment et être à l’aise dans son ouvrage.

ON VA ÉVOQUER À PRÉSENT LA DERNIERE ACTUALITÉ MACABRE DANS NOTRE PAYS, CES EFFONDREMENTS D’IMMEUBLES AYANT ENTRAINÉS DES PERTES EN VIES HUMAINES À DOUALA ET À NGAOUNDÉRÉ LA SEMAINE DERNIERE. VOS IMPRESSIONS EN TANT QUE TECHNICIEN DU DOMAINE ?ÇA PEUT AUSSI ARRIVER DANS VOTRE COMMUNE ?
Effectivement, ça peut arriver partout, Ça peut aussi arriver dans notre Commune comme partout ailleurs. Personnellement pour moi, c’est un regret, du gond de mon cœur. Mon regret, parce que je me rends compte que les investisseurs qui ont les moyens dans leurs poches pour construire des immeubles, cherchent seulement à faire des économies, le bénéfice, ils ne pensent pas aux conséquences plus tard, au suivi de leurs bâtiments, à l’exploitation á long terme et aux accidents qui peuvent subvenir à cause de leurs jongleries.

Ils se disent que le but c’est de couler une dalle, puis couler encore une autre dalle au dessus, ainsi de suite, même en bricolant, question de montrer qu’ils sont des grands hommes. On constate que les Camerounais qui ont beaucoup d’argent négligent l’essentiel : le respect de la vie humaine .Pourtant, il y a des normes à respecter. Donc c’est ce manque de rigueur dans la réalisation de l’ouvrage que je déplore car je sais que c’est l’une des causes de ces effondrements d’ immeubles.
Et au finish , en croyant faire des économies, leurs investissements se transforment en argent perdu , comme les immeubles qui se sont effondrés à Douala et à Ngaoundéré. Un promoteur peux se dire que “j’ai peut être mes cinquante millions pour construire mon immeuble. Et si je mets peut être dix millions pour réaliser une bonne étude et pouvoir lancer mon bâtiment, c’est trop cher ” Il voit donc ça comme une perte. Or ce sont ces dix millions là qui peuvent faire réaliser une bonne étude pour pouvoir construire un bâtiment dans les normes de confort et de sécurité.
Autre chose très importante, c’est l’exécution des travaux. Il ne faut pas dépenser de l’argent pour les études techniques et par la suite pour la réalisation, confier les travaux à un maçon du quartier. Il faut également un grand suivi parce qu’il faut faire aussi les études sur les matériaux, sur le type de ciment, sur la qualité des fers, la qualités des agrégats, et même l’eau de gâchage même qui pose un grand problème parce que l’eau de gâchage, ça peut être une mauvaise eau, ça peut ramener des matériaux organiques et ralentir la résistance du ciment. Ça , beaucoup de ” maçons” de quartier l’ignorent ou alors, ne le respectent pas. Donc ce sont ces moyens là et la main d’œuvre qualifiée qui sont indispensables. La main d’œuvre qui n’est pas qualifiée est un risque pour le projet. Or dans certains chantiers, il n’y a pas un réel suivi. L’important pour eux c’est d’aller vite et limiter les dépenses.
Donc c’est pourquoi moi je disais que j’ai un grand regret pour tous ces effondrements qu’on pouvait éviter . Parce que ça m’embête un peu qu’ il y ait des ingénieurs qui ont eu à faire des études. Il y a des architectes et des techniciens qui sont là, qui ont des gros diplômes dans les poches mais personne ne vient auprès d’eux pour solliciter leur expertise. On préfère le bricolage au Cameroun au lieu de promouvoir le bon travail. On se rabat plutôt auprès des charlatans du quartier. Beaucoup de regrets et de tristesse.
Maintenant, pour la suite de ces accidents, l’opinion publique, les autorités, les gens demandent des mesures fortes. On doit veiller. Mieux suivre, mieux élaborer, lutter même contre les bâtiments à risque dans les différentes communes, les différentes collectivités territoriales décentralisées .C’est notre cas a Yaoundé 5e .
QU’EST-CE QUI EST FAIT CONCRÈTEMENT DANS LE SENS DE LA LUTTE CONTRE CES BATIMENTS À RISQUE D’EFFONDREMENTS DANS VOTRE COMMUNE ?
Les bâtiments à risque dans notre Arrondissement, on en voit souvent parce qu’il y a des ouvrages qui sont construits dans des zones non constructibles, de fortes pentes , les marécages, etc…À notre niveau, on ne peut que sensibiliser les gens qui habitent là-bas dans ces zones là. Il y a aussi le cas de ce grand immeuble qui s’est incliné au Carrefour Pakita , et il est même couché sur un autre immeuble. L’affaire est au tribunal, dans l’attente d’une décision de justice pour sa destruction. Donc c’est à un autre niveau pour ce cas là.
QUE DOIVENT FAIRE LES USAGERS, LES POPULATIONS QUI VEULENT LANCER DES TRAVAUX DE CONSTRUCTION SUR LE TERRITOIRE DE LA COMMUNE DE YAOUNDÉ 5 ?
D’abord, leur demander de se rapprocher de la Mairie pour avoir les bonnes informations, savoir si le terrain qu’on voudrait acheter est dans une zone constructible ou pas. Est ce qu’il y a un projet qui est prévu là bas par l’État? On va commencer par leur donner toutes les informations nécessaires pour la bonne marche de leur projets. Car, nous l’oublions pas, nul n’est censé ignorer la loi.
Et même quand vous êtes déjà propriétaire de votre parcelle de terrain, rapprochez vous de la Mairie directement pour avoir au moins la liste des documents à fournir pour avoir votre permis de construire ou bien n’importe quel document d’urbanisme.

ET QUI DOIT S’ACQUITTER DE TOUTES CES DEMARCHES ? LE “PROPRIETAIRE” DU CHANTIER OU LA PERSONNE À QUI ON A CONFIÉ LA RESPONSABILITÉ DES TRAVAUX, LE ” CHEF CHANTIER” ?
Le responsable du bâtiment, celui à qui revient le bâtiment, c’est ce promoteur , le maitre d’ouvrage. C’est lui qui met de son argent pour construire puisque l’ouvrage va lui revenir. C’est lui qui doit engager ces démarches là , qui doit chercher la bonne information et obtenir tous les documents nécessaires.
Et s’il est assisté d’un Ingénieur ou bien d’un Architecte, qui comprennent mieux tous ces aspects là, ce serait plus efficace pour lui. Ils vont lui dire” OK, Monsieur Le Promoteur, voici tel document qu’il va falloir qu’on ait , il nous faut ci ou ça …au moins notre permis de bâtir. Donc il faut aller au moins auprès d’une mairie.”
Or si ce n’est pas un ingénieur qui l’accompagne, mais plutôt un maçon du quartier, un gars qui lui, a envie de son travail, et de son argent, il va éviter toutes ces démarches qui pour lui ne représente que des tracasseries et des pertes de temps.
Et la plupart du temps, c’est ce maçon du quartier qui va même décourager le Promoteur à ne pas venir à la Mairie pour faire ces documents. Donc je le répète, la responsabilité, c’est au Promoteur de se rapprocher de la municipalité pour pouvoir faire ces documents.
ES-CE QU’IL Y’A UN DERNIER MOT, UNE CONCLUSION, UN CONSEIL QUE VOUS POUVEZ DONNER À NOS LECTEUURS ?
Comme conseil , ce que je peux dire c’est que messieurs, soyez vraiment prudents, prenez vraiment tous les engagements pour être en sécurité, de pouvoir jouir de votre bien, de pouvoir vraiment utiliser votre argent à bon échéant . Prenez toutes les mesures pour pouvoir être en règle avec toutes les lois qui encadrent l’univers de la construction. Et même si on a l’impression au départ que ça coute cher, il vaut mieux s’entourer avec les experts, les ingénieurs, pour pouvoir monter son projet et pouvoir jouir de son investissement. Donc voilà le conseil que je peux donner aux populations.

Ce que ça fait…ça fait !
Entretien réalisé le 1er aout 2023, à la Commune d’Arrondissement de Yaoundé 5e.