C’est l’une des principales conclusions du rapport de l’étude ” Gouvernance de l’eau et bien être des citoyens de la ville de Bertoua : cas des Communes de Bertoua 1er et Bertoua 2e ” menée par Actions for Development and Empowerment (ADE) . Elle porte sur l’évaluation des limites du système d’adduction d’eau potable aux populations de la capitale de la région du soleil levant. Le document a été présenté à la presse ce jeudi 2 novembre 2023 dans les locaux de cette OSC au quartier Bastos ici à Yaoundé . Au finish, le rapport suggère en urgence l’amélioration sine qua non de la collaboration entre la CAMWATER ( Région de l’Est ) et les CTD de Bertoua pour plus d’éfficacité dans ce segment vital qu’est l’accès des populations à l’eau potable.
Sommaire
Tout est parti d’une observation, d’un constat : le Cameroun dispose de ressources importantes en eau mais paradoxalement ne dispose pas de l’essentiel des équipements pour approvisionner ses citoyens en eau potable . Suite à des investigations menées dans la ville de Bertoua, il a été constaté que nombre de citoyens se plaignent qu’ils n’ont pas accès à l’eau potable et cette situation est pour eux un veritable cauchemar . Conséquence, on a observé dans cette localité la persistance des maladies hydriques telles que le paludisme, la fièvre typhoïde , la dysenterie amibienne et surtout le choléra principalement dans la commune de Bertoua 2e .
Pour Actions for Development and Empowerment (ADE), une organisation de la Société Civile camerounaise, il fallait chercher à comprendre ce qui justifie ce paradoxe. Non pas pour des poursuites ou des représsions contre d’éventuels responsables des manquements dans la chaîne de distribution de l’eau potable au Cameroun, mais plutôt , pour cet acteur majeur de la Société Civile , de disposer d’une base de données solides dans la perspective d’un plaidoyer en faveur de l’accès de toutes les couches sociales à l’eau potable dans la capitale de la Région du soleil levant. Un projet qui va en droite ligne avec les Objectifs de Developpement Durable (ODD) adoptés par l’Organisation des Nations Unies en vue “d’éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir la prospérité pour tous” d’ici 2030 plus précisément l’ODD 6 : eau et assainissement que vient completer l’ ODD 3 : bonne santé et bien-être et l’ ODD 1: pas de pauvreté.

EVALUER LA GOUVERNANCE DE L’EAU DANS LA VILLE DE BERTOUA
Le projet “Eau pour Tous ” a été mis sur pied par ADE pour essayer d’évaluer la gouvernance de l’eau dans la ville de Bertoua mais aussi de déterminer le rôle de chaque acteur dans la chaîne des responsabilités notamment la Délégation Régionale de CAMWATER pour l’Est , les CTD (avec les Mairies de Bertoua 1er et Bertoua 2e ainsi que le Conseil Régional de l’Est ) l’Hôpital de District de Bertoua 2e, les Chefferies Traditionnelles du coin, les Autorités Administratives notamment les Sous-Préfet ( étant donné que c’est vers eux que les citoyens vont généralement déposer l’essentiel des plaintes liées à la qualité de l’eau .
L’échantillon de cette étude était constitué de 250 personnes sélectionnées dans les villes de Ngaikada et de Bertoua 2 à qui on a passé des questionnaires . Quels sont les acteurs sur le terrain ? Quelles sont les difficultés auxquelles ils font face ?
L’ eau potable est-elle accessible à tous les ménages dans cette partie du pays ? Que faut-il faire pour améliorer la desserte des ménages dans les quartiers ciblés ? Telles sont quelques questions unes des préoccupations qui ont orienté ces travaux.
À l’issue de la collecte et de l’analyse des données qui a durée près de 8 mois, de mars à octobre 2023, MBOUSSI À NDONG Paul Lionel , Manager de Projets au sein de ADE et qui a mené ces recherches , a abouti aux résultats ci-dessous :
- L’ eau d’adduction publique reçue par certains particuliers n’est pas conforme aux normes prescrites par l’Organisation Mondiale de la Santé ( OMS) et par conséquent non potable.
- 7 % seulement de la population ciblée par cette recherche sur les 205 citoyens interrogés sont connectés au réseau d’approvisionnement en eau de la CAMWATER et ceci du fait du manque de moyens financiers (des populations essentiellement constituées de commerçants , de ménagères et de cultivateurs)
- 36 % de la population interrogée ont recours uniquement à l’eau des puits pour se doucher faire la cuisine la lessive et pour d’aucuns, même boire .
-20 % de cette population à recours à des forages
-17 % des citoyens utilisent conjointement des points d’eau ( pour les travaux domestiques) et des forages (pour l’eau de la consommation )
-11 % des citoyens utilisent l’eau de source
-3 % des citoyens utilisent uniquement l’eau des rivières ( malgré tout ce qu’elle contient comme bactéries du fait de la pollution )

FAIBLE COLLABORATION ENTRE LES COMMUNES ET CAMWATER
Au regard de toutes ces insuffisances relevées plus haut , ce document présenté à l’opinion publique nationale et internationale via cette conférence de presse au siège de cette association au quartier Bastos ici à Yaoundé ce jeudi 2 novembre 2023 a donc aboutit à la conclusion selon laquelle le Projet de Réhabilitation, de Renforcement et d’Extension du Système d’Alimentation en Eau Potable de la Ville de Bertoua , élément qui a servi de prétexte à cette évaluation , n’a pas tenu toutes ses promesses . Financé par le Gouvernement de la République du Cameroun en collaboration avec l’ Agence Française pour le Développement ( AFD) et la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement ( BERD) à hauteur de 15,8 milliards de Francs CFA , cette initiative , d’après les sources du Ministère de l’Eau et de l’Energie (MINEE ) citées dans le rapport , était censé faciliter l’approvisionnement de 92 000 personnes en eau potable dans la ville de Bertoua.Ce qui sur le terrain, n’est pas le cas. Si par exemple les 60 bornes fontaines prévues dans le cahier de charges de ce projet ont bel et bien été livrées, le rapport de ADE nous fait savoir que seules 25 sont opérationnelles. Une situation qui découle de la faible collaboration entre la CAMWATER et les Communes d’Arrondissement de Bertoua 1er et Bertoua 2e.
En effet, contrairement aux soupçons de détournement de fonds qui plombe généralement la réalisation des projets au Cameroun et MBOUSSI À NDONG Paul Lionel qui a réalisé cette étude l’a si bien rappelé face à la presse, la CAMWATER a bel et bien mis sur pied l’ensemble des équipements qui étaient recommandés pour le projet notamment la construction de réservoirs, l’extension du réseau et la construction de bornes fontaines dans les quartiers ciblés. Cependant , le bémol se trouve plutot au niveau de la gestion de ces équipements. les bornes fontaines par exemple devaient être gérées par les mairies mais du fait de la faible collaboration entre ces deux entités il n’y a que 25 bornes fontaines sur 60 qui sont fonctionnelles ; les mairies s’étant finalement desengagées de cette gestion du fait d’incompréhensions à la base. Et pour cause : pour les mairies , l’accès à ces bornes fontaines devait être gratuit alors que la CAMWATER qui cherche à amortir ses investissements à exigée une modeste contribution financiere (entre 25 f et 50 f , en fonction des recipients) aux populations. Une incompréhension qui plombe donc ce projet. La CAMWATER finalement obligée de s’ appuyer sur les particuliers pour la gestion de ces bornes fontaines en lieu et place de ces mairies qui pourtant ont aussi pour objectif l’amélioration de l’accès de leurs citoyens à l’eau potable.

IMPLIQUER LES POPULATIONS DANS LA GOUVERNANCE DE L’EAU AU NIVEAU LOCAL
Au-delà du constat de ce manque d’efficacité parlant de la gouvernance des eaux à Bertoua, ADE à travers ce document de 42 pages dans sa version en langue française , a mis sur pied un certain nombre de recommandations à l’endroit des différentes parties :
(1) : Au Ministère de l’Eau et de l’Energie ( MINÉE ) : œuvrer dans le sens de l’élaboration d’un corpus juridique qui encadre la coopération entre les délégations régionales de la CAMWATER et les Collectivités Territoriales Décentralisées ( CTD).
(2) Pour le Ministère de la Santé ( MINSANTÈ) : doter tout d’abord l’Hôpital de District de Bertoua 2e d’une source d’approvisionnement en eau portable et ensuite doter chaque Région du Cameroun et voir même chaque Département de laboratoires d’analyses microbiologique de l’eau .
(3)-Pour le Ministère de l’Administration Territoriale ( MINAT ) : donner aux Sous-Préfet le pouvoir et les moyens d’intervenir dans la résolution des litiges liés à l’eau.
(4)À La CAMWATER : le renforcement de la coopération avec les communes pour l’extention efficace dans les quartiers défavorisés
(5)Aux Communes ( Bertoua 1er et Bertoua 2e): Améliorer tout d’abord la collaboration avec CAMWATER . Assurer ensuite la construction , le suivi et la maintenance des puits et forages dans les zones non couvertes par le réseau public d’approvisionnement en eau potable et impliquer les citoyens dans la gouvernance de l’eau au niveau local
(6) : Pour les partenaires financiers notamment l’Agence Française pour le Développement (AFD) et la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) : impliquer la Société Civile dans le suivi-évaluation des projets d’adduction d’eau potable .
(7) : Pour les citoyens : changer les habitudes traditionnelles (c’est-à-dire l’utilisation de l’eau des puits et des rivières) au profit de celles modernes (la connexion au réseau de la CAMWATER ) et s’informer sur les facilités mises en place par la CAMWATER pour l’accès de tous à une eau et potable.
Sur le terrain depuis 2019, Actions for Development and Empowerment (ADE) est une organisation de jeunes sensibles aux problèmes qui affectent leur quotidien et celui de leurs semblables. Pour mener à bien ses activités, cette OSC dispose de 03 programmes principaux d’où émanent des projets de plaidoyer pour une participation effective à la gouvernance nationale. Il s’agit des initiatives baptisées Démocratie et bonne gouvernance, SDG Education et Girls Child Education.
Après ce travail de fourmis, l’Association dirigée par NDI Nancy SAIBOH se tourne désormais vers la presse pour porter les conclusions de ce rapport auprès des populations, des décideurs et des partenaires aux développement avec l’espoir de faire bouger les lignes.
Ce que ça fait….ça fait !
